Jugement N° 2867 du Tribunal administratif de l'Organisation internationale du Travail sur requête contre le Fonds international de développement agricole
VUE D'ENSEMBLE DE L'AFFAIRE
En avril 2010, la Cour a reçu une demande d’avis consultatif du Fonds international de développement agricole (« FIDA »), institution spécialisée des Nations Unies, concernant un jugement du Tribunal administratif de l’Organisation internationale du Travail (« TAOIT ») rendu le 3 février 2010. Dans ce jugement, le TAOIT ordonnait au FIDA de verser à une fonctionnaire du Mécanisme mondial de la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification — dont il est l’organisme d’accueil — l’équivalent de deux années de traitement ainsi que des dommages-intérêts pour préjudice moral et de lui rembourser ses dépens, en raison de la suppression de son poste et du refus de renouveler son contrat.
La Cour, dans l’avis consultatif qu’elle a rendu le 1er février 2012, a tout d’abord vérifié sa compétence pour répondre à la demande, et examiné l’opportunité d’exercer cette compétence en l’espèce. S’agissant de sa propre compétence, la Cour, se référant à ses précédents avis, a rappelé qu’elle ne peut connaître d’une contestation élevée contre un jugement du TAOIT, en vertu de l’article XII de l’annexe au statut du Tribunal, que pour deux motifs : soit parce que le TAOIT a affirmé à tort sa compétence, soit parce que sa décision a été viciée par une faute essentielle dans la procédure suivie. S’agissant de l’opportunité de répondre à la demande d’avis, la Cour a souligné les difficultés que fait naître la procédure de réformation des jugements du TAOIT, tant du point de vue de l’égalité d’accès à la Cour que du point de vue de l’égalité dans la procédure se déroulant devant celle-ci, seule l’institution employant le fonctionnaire ayant accès à la Cour. La Cour a en particulier constaté que le principe de l’égalité d’accès aux procédures d’appel ou autres recours disponibles, sauf exception fondée sur des motifs objectifs et raisonnables, doit désormais être considéré comme partie intégrante du principe de l’égalité, qui découle des exigences d’une bonne administration de la justice. Bien que le système de réformation en vigueur ne paraisse pas satisfaire effectivement au principe moderne de l’égalité d’accès aux cours et tribunaux, la Cour, à qui il n’appartient pas de modifier ce système, n’a pas jugé devoir refuser de répondre à la requête pour un tel motif. La Cour a par ailleurs veillé, conformément à la pratique suivie lors de précédentes demandes de réformation, à atténuer l’inégalité devant elle du fonctionnaire et de l’institution qui l’emploie, inégalité découlant des dispositions de son Statut, en décidant que le président du Fonds devait lui transmettre toute déclaration exposant le point de vue de Mme Saez García que celle-ci pourrait vouloir porter à son attention, et qu’il n’y aurait pas de procédure orale (son Statut ne permettant pas aux personnes physiques de participer en pareil cas à des audiences). La Cour a ainsi conclu sur ces différents points en réaffirmant sa préoccupation face à l’inégalité d’accès à la Cour, mais en considérant néanmoins que compte tenu de l’ensemble des circonstances de l’espèce, en particulier des mesures qu’elle avait prises aux fins de réduire l’inégalité dans la procédure se déroulant devant elle, que les raisons qui auraient pu la pousser à refuser de donner un avis consultatif n’étaient pas suffisamment décisives pour la conduire à le faire.
Sur le fond de la demande, la Cour a examiné et confirmé la validité du jugement rendu par le TAOIT au sujet du contrat d’engagement de Mme Saez García. Il était en particulier demandé à la Cour de se prononcer sur la compétence du TAOIT pour connaître de la requête de la fonctionnaire dirigée contre le FIDA. Ce dernier soutenait que Mme Saez García était une fonctionnaire du Mécanisme mondial, que ce dernier n’était pas un organe du Fonds, et que par conséquent l’acceptation de la compétence du Tribunal par le FIDA ne s’étendait pas à la plainte de la requérante. La Cour a jugé, sur ce point, que Mme Saez García était bien un fonctionnaire du FIDA, et que le Tribunal était ainsi compétent ratione personae pour examiner sa requête. Par ailleurs, la Cour a considéré que les griefs de la fonctionnaire étaient de ceux dont pouvait connaître le TAOIT, conformément à son statut. En particulier, la Cour a jugé que la contestation de la décision du Fonds de ne pas renouveler le contrat de la fonctionnaire entrait dans la catégorie des requêtes invoquant l’inobservation des stipulations de son contrat d’engagement ou des dispositions statutaires ou réglementaires applicables au personnel du Fonds, ainsi qu’il est prescrit au paragraphe 5 de l’article II du statut du Tribunal. Ayant conclu que le TAOIT était ainsi fondé à affirmer sa compétence, tant ratione personae que ratione materiae, la Cour a estimé que les autres contestations soulevées par le Fonds n’appelaient pas de réponse de sa part, soit parce que certaines contestations visaient à solliciter l’avis de la Cour sur le raisonnement du Tribunal ou sur son jugement au fond, points sur lesquels la Cour n’a aucun droit de regard dans le cadre d’une procédure en réformation, soit parce que les contestations constituaient une répétition de la question relative à la compétence, sans autres éléments, à laquelle la Cour avait déjà répondu.
Cette vue d’ensemble de l’affaire est donnée uniquement à titre d’information et n’engage en aucune façon la Cour.